"On a trop baissé" : le mea culpa de la SETRAM
De premières corrections seront apportées dans les dessertes de la SETRAM en décembre
Publié : 6 novembre 2018 à 13h51 par à‰lise Catalanotti
Deux mois à peine après avoir remanié le réseau de transports en commun de l'agglomération mancelle, la SETRAM révise sa copie. Début décembre, elle remettra un ou deux bus en circulation là où elle en a enlevé plus d'une vingtaine par jour.
Face au bureau de Loïc Latour avenue Pierre-Piffault en périphérie du Mans, un grand tableau blanc est accroché au mur. Quadrillé, avec dans chaque case des notes sur telle ou telle ligne. C’est là que le directeur marketing de la SETRAM note les réclamations portées à son attention depuis fin août : "Il n’y a pas eu de réorganisation depuis très longtemps, pas depuis 2007, au moment de la première ligne de tram" précise-t-il, avant de souligner qu'à chaque fois qu’il y a des changements, "il y a aussi des ajustements à effectuer, on n’a pas la science infuse, alors on va recaler".
Un nouveau plan qui n'est pas passé inaperçu
Il faut dire que les usagers ont senti passer le nouveau plan. La plupart des lignes a en effet vu le nombre des bus passant chaque jour de semaine en période scolaire diminuer. Sur les lignes 4, 11 et 13 par exemple, on en compte cinq ou six en moins. Mais sur la 5, ce sont douze bus qui ont disparu par rapport à l’an dernier entre 5h du matin et minuit. Jean-François Soulard, qui préside la SETRAM et siège aussi au Mans Métropole en tant que vice-président chargé des transports le reconnaît volontiers : "Dans le cahier des charges de la dernière délégation de service public, il y avait une demande de la métropole de... passez-moi l’expression « baisser la voilure » sur les dessertes des bus".
Jusqu'à 27 bus en moins
Sur la ligne 17, on dénombre carrément dix-sept bus en moins, un chiffre qui grimpe jusqu’à vingt-et-un sur la ligne 16, vingt-quatre sur la 12 et enfin, record, vingt-sept sur la 10. On ne parle là que des horaires en semaine, car le week-end la tendance observée est souvent identique. Alors bien sûr, des modifications de tracé compensent partiellement parfois ces saignées dans le maillage de bus. Et à l’inverse, certains parcours bénéficient de la refonte. Ainsi pour se rendre au centre commercial de la zone nord le samedi et le dimanche, plus d’une quinzaine de bus supplémentaires sont désormais à la disposition des habitants du centre-ville du Mans. Parmi les autres choix effectués, celui de favoriser les étudiants de l’université en renforçant la ligne de tram numéro 1.
La SETRAM en mode service après vente
A l’arrivée d’une vingtaine de courriers de protestation sur le bureau du maire du Mans, la SETRAM a décidé d’aller entendre les doléances, en se rendant par exemple au conseil de quartier nord-est de la ville : "C’est vrai que là, on a eu je pense une cuiller un peu trop grosse pour baisser" admet Jean-François Soulard. "La SETRAM es qualités n’a pas le droit de modifier les choses, cela doit passer par la métropole donc cela fera l’objet d’un avenant en conseil. On va redonner un peu de service à cette ligne 12, car les chiffres sont réels, on a trop baissé l’offre".
De premiers ajustements début décembre
Certains ajustements ont déjà été validés, ils s'appliqueront au 3 décembre : un bus supplémentaire le matin et le soir sur la 12 dans les quartiers Villaret-Prémartine-Ardriers, "et puis des fois, on recale un peu les horaires pour mieux ajuster les correspondances ou mieux assurer l’heure de pointe. C’est le cas sur la 16 qui dessert Batignolles, l’heure de pointe du tram également, on a là aussi des petits soucis, et les lignes 7 et 14. Enfin on a ajouté des navettes scolaires, par exemple entre Psalette et Sargé" précise Loïc Latour.
Les habitudes ont déjà changé
La société des transports en commun de l’agglomération mancelle s’attendait en effet à devoir assurer un peu de service après vente. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle n’a pas imprimé autant de guides horaires que les années précédentes, au cas où il faudrait les revoir. Par souci d’économie de papier, "d’écologie, donc" souligne Loïc Latour. Cependant les changements annoncés semblent déjà minimes à certains usagers. Valérie Ropers habite le Villaret : elle a fait le choix il y a quelques années de ne pas avoir de véhicule personnel, et comptait sur les transports en commun, qu’elle emprunte régulièrement. Après avoir découvert l’allongement du délai entre deux passages de bus, elle a cessé de s’arrêter pour attendre le 12 au cas où, comme elle le faisait auparavant.
Un allongement des temps de parcours dissuasif
"Pour se rendre en centre-ville le mercredi matin et amener des enfants à leurs activités à 11h30, il faut prendre le bus de 10h42" explique-t-elle, découragée. "Un temps incroyablement long alors qu’on est à dix minutes en voiture ! Ce n’est pas une incitation à prendre les transports en commun. Et ce n’est pas un bus de plus aux heures de pointe qui va changer cela". Elle comprend d’autant moins la disparition d’une vingtaine de bus par jour que de nouveaux quartiers sur son secteur ne sont pas desservis :"Rue de la Musardière, près du stade des Fontenelles, le nouveau pâté de maisons face au supermarché également, dans le prolongement de la rue d'Isaac, tous comportent du logement social, et d’autres lotissements sont en projet".
L'abandon de la ligne circulaire
Valérie Ropers regrette toujours l’abandon de la ligne de bus circulaire qui faisait le tour du Mans, jusqu’à la mise en service du tramway : "Pour être sûr que ce dernier se remplisse, le but à l’époque a été de favoriser le passage systématique de toutes les lignes par le centre-ville. Celle qui permettait aux habitants du nord-est de rejoindre la Californie par exemple, gros pôle d’emploi, a été supprimée, et les travailleurs sont nombreux aujourd’hui à s’y rendre en voiture !" analyse-t-elle, à regrets.
Choix écologique, économique ou... politique
"La SETRAM n’est pas décisionnaire. En tant qu’exploitante du réseau pour Le Mans Métropole, elle a un devoir de conseil afin d’aider la collectivité à faire les bons choix d’itinéraires et d’horaires. On a mis deux ans pour arriver au plan d’aujourd’hui, on a étudié les habitudes des usagers, comment et où ils se déplacent" affirme Loïc Latour. Et c’est bien cela qui met en colère les usagers mécontents, eux qui viennent justement de recevoir dans leur boîte aux lettres un magazine municipal très "vert" : "En gros, ils amènent un bus à ceux qui le prennent déjà… et ça s’arrête là. Cela va à l’encontre de ce qu’il faut faire pour le bien de la planète, et c’est en décalage avec ce que l’on entend jour après jour !" gronde Thomas, 36 ans.
Moins de bus réguliers, plus de navettes à la demande
A cela, la réponse est chiffrée : "Un bus revient à 300 000 euros environ, le but n’est pas d’en acheter toujours plus. Il y a une dimension service public, mais aussi.. finances publiques !" tempère Loïc Latour, soulignant que "les petites navettes à la demande permettent d’économiser". Une démarche également observée dans d’autres villes de France. Depuis deux ans environ, face à la baisse des subventions, les collectivités locales qui doivent se serrer la ceinture s'interrogent sur le maintien de ces lignes régulières sur lesquelles on voit circuler des bus à moitié vides.