Stéphane Le Foll : "La gauche n'est pas en mesure de remporter la présidentielle"
Crédit : Jonathan Lateur
Publié : 14 octobre 2021 à 13h07 par Jonathan Lateur
Annoncé largement battu par Anne Hidalgo lors du vote interne organisé ce jeudi au sein du PS, Stéphane Le Foll ne croit pas en la victoire d'un candidat de gauche à la prochaine élection présidentielle. Entretien avec le maire du Mans.
Sweet FM : Pourquoi ne pas avoir, comme Anne Hidalgo, participé au Facebook Live avec les militants du PS ?
Stéphane Le Foll : Je n’y ai pas pris part parce que je réclamais un vrai débat, pas des questions enregistrées et sélectionnées à l’avance par la direction du Parti Socialiste. Un rendez-vous avec 500 personnes en ligne ne peut pas se substituer à un véritable échange de fond. De plus, le Facebook Live d’Anne Hidalgo avait été organisé avant que l’on me propose d’y participer.
Votre défaite ne fait aucun doute, votre nom n’était parfois même pas cité parmi les prétendants. Avez-vous eu l’impression d’être méprisé ou victime d’une certaine forme d’ostracisme ?
En effet, il y a un peu ce regard de la part de certains médias parisiens considérant qu’Anne Hidalgo était déjà candidate avec le soutien d’Olivier Faure. Il n’y a aucun dialogue entre elle et moi parce que je passe pour celui qui est marginalisé et minoritaire au sein du PS. Il y a une forme de mépris. La seule fois qu’elle a souhaité me rencontrer, elle a fait appeler sa cheffe de cabinet pour dire qu’elle voulait me voir à Nantes, comme si j’étais censé être convoqué. J’ai été cinq ans ministre, trois ans et demi porte-parole du gouvernement, je suis maire d’une grande et belle ville, j’ai gagné et conservé une circonscription historique de droite depuis 1958, donc j’ai quelque chose à dire, et pas seulement à être mis de côté et méprisé.
Irez-vous malgré tout à Lille pour le congrès d’investiture prévu le 23 octobre ?
Non, je n’irai pas à Lille pour assister au deuxième lancement de la campagne d’Anne Hidalgo. Après Rouen, se retrouver aux côtés de Martine Aubry et de Lionel Jospin, qui dans son livre a expliqué que Jean-Luc Mélenchon avait sa préférence, cela me paraît étrange mais je laisse ceux qui gèrent sa campagne bien mesurer les impacts politiques que cela pourrait avoir.
Etes-vous déçu que François Hollande n’ait pas pris la parole publiquement pour vous soutenir ?
Oui, il m’a déçu comme d’autres personnalités du PS. En off, ils sont nombreux à s’exprimer, mais personne ne prend ensuite la parole publiquement. Je suis le seul à m’exprimer et à dire des choses claires. Cela restera d’ailleurs une partie de ce qui fait ma franchise, mais je ne peux que constater que je suis esseulé. J’aurais au moins souhaité du soutien à mon idée de débat, cela aurait été utile. Les Verts ont réussi leur primaire et les Républicains vont en avoir une. Le 4 décembre, ils désigneront leur candidat, on verra la différence.
Pourquoi le PS a eu peur du débat ?
Cela ne date pas d’aujourd’hui, c’est l’orientation post défaite présidentielle liée au fait que François Hollande n’ait pas pu se représenter. Le parti s’est reconstruit en considérant qu’il fallait oublier le quinquennat précédent. Sauf que, lorsque vous adoptez cette stratégie, vous laissez penser aux électeurs que nous n’avons pas fait ce qu’il fallait faire. Résultat, ils restent chez Macron ou vont chez les Verts. Il est trop tard, je n’arriverai pas à renverser la vapeur car il y a un vrai problème collectif.
Selon vous, la gauche aujourd’hui ne parle plus aux classes populaires ?
Oui, je peux illustrer mon propos avec l’exemple des gilets jaunes. Ces gens sur les ronds-points n’attendent pas le revenu universel, de devenir fonctionnaires ou qu’on leur propose une semaine à 32 heures. Ni Jean-Luc Mélenchon, ni la CGT n’ont été capables de donner un débouché aux volontés de cette classe insécurisée. Quant à Anne Hidalgo, elle ne peut pas dans le même temps proposer de réduire le temps de travail et d’augmenter les salaires, personne ne peut y croire.
Vous n’êtes pas très optimiste quant aux chances de votre camp au mois de mai prochain...
Dans les sondages, la gauche, tous candidats confondus, plafonne à 30%. Il n’y a tout simplement plus de parti de gouvernement. Je suis convaincu qu’il y aura une nouvelle recomposition politique après la présidentielle. Emmanuel Macron cherche encore à dynamiter les Républicains quand Edouard Philippe a déjà préempté la recomposition de la droite. Il en sera de même à gauche car nous ne pouvons pas rester sans aucun parti de gouvernement. Il y aura un retour à un autre Parti Socialiste qui s’appellera peut-être autrement car aujourd’hui la photo est claire, la gauche n’a pas de candidat capable de gagner l’élection présidentielle.