Grippe aviaire : "Avec le confinement, le bien-être animal n’est pas respecté"
Publié : 18 avril 2022 à 17h52 par Joris Marin / crédit photo : Sweet FM
Après le Covid, la grippe aviaire. Pour éviter la propagation de la maladie, toutes les volailles doivent être confinées depuis fin 2021, en France... ce qui relègue au second plan le bien-être animal selon le porte-parole de la Confédération paysanne du Calvados.
A l’isolement ! Et ce n’est pas la population française qui doit rester enfermée à la maison dans le cadre de la lutte contre le Covid cette fois : depuis fin 2021, sur l'ensemble du territoire national, y compris en Normandie, toutes les volailles issues d’élevages de particuliers ou de professionnels doivent être confinées. Objectif : faire face à la grippe aviaire, maladie virale qui sévit chez les oiseaux et dont le taux de mortalité est très élevé chez les oiseaux d’élevage comme les poulets ou encore les oies -la plupart des virus aviaires n’infectent pas l’homme-. "En ce qui concerne notre région, on a noté récemment plusieurs cas en Seine-Maritime : un foyer en élevage professionnel, une oie atteinte dans la faune sauvage et deux foyers en basse-cour" détaille Stéphane Bourlier, porte-parole de la Confédération paysanne du Calvados, qui défend l’élevage en plein air. Notre région n’est pas au stade de la Vendée, connue pour une densité importante d'animaux dans les exploitations. "Dans ce département, seulement quatre animaux sauvages ont été découverts morts à cause de la grippe aviaire, qui en même temps a touché 523 élevages professionnels. Le lien entre la faune sauvage et les exploitations professionnelles, on peut en douter vu le ratio" poursuit Stéphane Bourlier, qui se dit inquiet pour l’ensemble de ses collègues normands, notamment. En cause, l’approvisionnement en poussins d’un jour, canetons, oisons, qui ne se fait plus. La Vendée étant un gros fournisseur. Conséquence, il pourrait y avoir des déçus à Noël. "Il y aura très peu ou pas du tout d’oie et de canard. Peut-être pas de pintade".
"L'Etat défend les industriels"
En cas de non-respect du confinement, les agriculteurs s’exposent à des visites et contrôles de la DDPP (Direction départementale de la protection des populations) avec des obligations de respecter les normes de biosécurité. Stéphane Bourlier n’a pas eu vent de telles mesures prises à l’encontre de paysans normands. Mais, il y a bien des élevages qui ne sont pas claustrés, reconnaît-il, "car le bien être-être animal fait qu’on ne doit pas cadenasser les animaux". La Confédération paysanne a engagé des actions pour faire annuler les décrets de confinement des volailles. "Nos recours ont été rejetés par le Conseil d’Etat. Rien de surprenant, c’est la politique agricole française. Le ministère est opposé aux volailles à l’extérieur. Cela répond aux demandes des industriels. L’Etat les défend. Quand on voit les chiffres du nombre d’élevages touchés par la maladie, en grande majorité la propagation se fait là où il y a des milliers d’animaux enfermés, qui ne voient pas la lumière du jour. Ils ne sortent pas et il y a quand même des problèmes de grippe aviaire" observe le syndicaliste.
Effets négatifs de l'isolement
Installé depuis un an entre Saint-Lô et Caen, à Cormolain, Clément Justin élève des poulets de chair et des poules pondeuses en agriculture biologique. Un début d’activité perturbé par les restrictions. "Le 5 novembre, j’ai reçu un e-mail disant que toutes les volailles devaient être enfermées, peu importe le label". Chose que ce professionnel âgé de 30 ans a respecté. Tout du moins au départ, sachant que cela ne correspondait plus du tout au cahier des charges bio. "Les poules pondeuses doivent par exemple disposer de 4 mètres carrés à l’extérieur. Un point sur lequel j’ai mis beaucoup d’importance quand j’ai lancé mon activité, histoire que mes animaux aillent dehors tous les jours". Cette claustration a eu des conséquences. "Ils n’ont pas compris pourquoi ils ne pouvaient plus sortir. D’habitude, ils mangent et boivent à l’intérieur avant de gambader en extérieur".
Poulaillers ouverts, malgré l'interdiction
A la suite de ce constat, Clément Justin -qui vend ses productions notamment sur les marchés, comme le mercredi matin à Bayeux et le jeudi soir cours Koenig sur la promenade de l'hippodrome de Caen- a décidé malgré l’interdiction d’ouvrir les portes des poulaillers. Un choix motivé par plusieurs raisons : "Le bien-être animal. Mais pas que. Aucun élevage de plein air n' a été touché par la grippe aviaire, me semble-t-il". Les animaux de Clément passent donc une partie de la journée dehors, bien moins qu’avant cependant. "Les poules pondeuses sortent deux ou trois heures avant le coucher du soleil. Auparavant, c'était dès le lever". Cet agriculteur normand ayant grandi aux portes de Falaise ne fait pas pour autant n’importe quoi sur le plan sanitaire. "L’homme n’attrapera pas la grippe aviaire en mangeant un œuf d’une poule pondeuse qui aurait la grippe aviaire. Si justement la bête est malade, l’éleveur va l’écarter. Et si vous dégustez une volaille de chair, il n’y a aucun risque dans la mesure où vous allez la manger après une cuisson. Les bactéries et les virus auront été éliminés".